Frères et Sœurs,
Nous célébrons la solennité de Sainte-Marie, Mère de Dieu, qui est en même temps la Journée Mondiale de la Paix, dans un contexte mondial particulièrement difficile. Je veux parler d’un ensemble de signes préoccupants qui sont liés les uns aux autres : l’instabilité géopolitique, l’évolution climatique qui est source de tensions, de migrations, auxquels il faut ajouter le fossé qui se creuse entre les plus riches et les plus pauvres, mais aussi les évolutions sociétales qui font violence à la nature et à ce qui touche à la vie humaine dans ce qu’elle a de plus précieux.
Tout cela génère des peurs et de la violence comme le souligne le pape François dans le Message qu’il nous a délivré pour cette journée : « Toute situation de menace alimente le manque de confiance et le repli sur soi. Le manque de confiance et la peur renforcent la fragilité des rapports et le risque de violence, dans un cercle vicieux qui ne conduira jamais à une relation de paix. » N° 1.
Dans ce passage, le pape évoque une paix entre les États basée sur la menace mutuelle, qui évidemment n’est pas la paix voulue par Dieu, même s’il n’indique pas comment nous pourrions sortir de ce cercle vicieux sachant que le désarmement concerté et généralisé paraît si difficile à mettre en œuvre dans le contexte actuel !
C’est pourquoi le pape nous invite tous à la conversion, car l’instabilité du monde, les conflits, naissent d’abord dans le cœur de chaque être humain ! Comme le dit Jésus : « C’est du dedans, du cœur de l’homme, que sortent les pensées perverses : inconduites, vols, meurtres, adultères, cupidités, méchancetés, fraude, débauche, envie, diffamation, orgueil et démesure. » Mc 7, 21-22. C’est bien de là en effet que viennent les divisions et les conflits de tous ordres.
En priant pour la paix dans le monde, nous devons nous mettre à la disposition du Seigneur, car nous pouvons tous faire quelque chose, au moins pour une part. Mais notre part, même modeste, est bien précieuse !
Comme le souligne le pape : « Le monde n’a pas besoin de paroles creuses, mais de témoins convaincus, d’artisans de paix ouverts au dialogue sans exclusions ni manipulations. » N° 2.
Si la guerre prend sa source dans le cœur de l’homme, la paix aussi vient du cœur de l’homme, et elle passe par la conversion personnelle et par l’accueil de la grâce de Dieu.
En parlant de conversion personnelle, je pense à deux appels qui sont particulièrement importants à entendre aujourd’hui :
D’abord mettre un terme aux violences de tous ordres vis-à-vis des autres. Et elles sont nombreuses aujourd’hui : violences physiques malheureusement, mais aussi verbales comme des phrases assassines, des procès d’intention et toutes sortes de rumeurs. Je pense aussi à ce que nous pouvons diffuser par les réseaux sociaux : informations erronées, incomplètes ou même volontairement fausses, qui génèrent des divisions, attisent la peur de l’autre et suscitent des violences réelles. Y compris à l’intérieur de l’Église, entre chrétiens !
Nous pouvons en être les auteurs, mais aussi les complices si nous contribuons à diffuser cela. « Aucune parole mauvaise ne doit sortir de votre bouche ; mais, s’il en est besoin, que ce soit une parole bonne et constructive, profitable à ceux qui vous écoutent. » dit Saint-Paul (Eph 4, 29). Cela est valable aussi sur les réseaux sociaux.
D’autre part, mettre un terme aux violences faites à la nature dans l’esprit de Laudato Si, c’est-à-dire en développant une écologie qui intègre à la fois la protection de l’environnement, mais aussi le bien des personnes dans leur globalité depuis leur conception jusqu’à leur mort naturelle. Comme le dit le pape : « Cette conversion doit être comprise de manière intégrale, comme une transformation des relations que nous entretenons avec nos sœurs et nos frères, avec les autres êtres vivants, avec la création dans sa très riche variété, avec le Créateur qui est l’origine de toute vie. Pour le chrétien, elle demande de « laisser jaillir toutes les conséquences de la rencontre avec Jésus-Christ sur les relations avec le monde ». N° 4.
Notre conversion consiste aussi à cultiver sans cesse la bienveillance dans tous nos rapports humains, jusqu’à aimer même nos ennemis et à prier pour ceux qui nous persécutent comme nous y invite Jésus (Cf. Mt 5, 44)
« C’est seulement en choisissant la voie du respect qu’on pourra rompre la spirale de la vengeance et entreprendre le chemin de l’espérance. » N° 2.
De fait, nous avons à développer la culture du pardon, et un pardon qui se nourrit du sacrement de la réconciliation, car nous croyons fermement, nous les baptisés, que nos efforts de pardon ne peuvent aboutir qu’avec la force de Dieu qui seul est capable de briser nos résistances et de faire grandir en nous la vraie communion.
Nous avons bien compris que la paix véritable ne peut venir que de Dieu et de son amour miséricordieux. « Que le Seigneur tourne vers toi son visage, qu’il t’apporte la paix. » nous dit l’auteur du livre des Nombres
Nos efforts de conversion, si nécessaires comme je l’ai dit, ne peuvent aboutir que s’ils ouvrent notre cœur à la source du salut que le Christ Jésus est venu apporter aux hommes en venant en ce monde. Sans Lui, tous nos efforts de paix seraient illusoires. Sans lui, nous ne pouvons rien faire !
Sainte-Marie, Mère de Dieu, vous que nous honorons aujourd’hui en tant que celle qui a mis au monde Jésus, notre Sauveur, priez pour notre humanité et notamment pour ceux qui subissent les effets de la violence, de la guerre, des changements climatiques, de l’injustice.
Priez pour que nous soyons toujours à l’écoute de ton Fils et animés par son Esprit d’amour.
Priez pour que se lèvent, partout dans le monde, des artisans de justice et de paix et que nous soyons de ceux-là.
Sainte-Marie, Mère de Dieu, priez pour nous.
† Laurent DOGNIN
Évêque de Quimper et Léon